Deux ans après l’évolution de la loi concernant l’accueil d’artistes en France, la situation ne s’améliore guère. Le festival francilien Africolor (du 16 novembre au 22 décembre) a traversé des semaines d’imbroglios pour faire venir dix musiciennes algériennes en France, membres du groupe Lemma. Le rappeur Camerounais Krotal a vu sa demande refusée, au motif qu’il n’avait pas fait preuve de moyens de subsistance en France, malgré les certificats de travail et d’hébergement du festival qui fête sa trentième année.
Son directeur, Sébastien Lagrave, témoigne : «La suppression de l’autorisation provisoire de travail pour les activités salariées inférieures à trois mois et la création du Passeport talent, permettant des allers-retours aux artistes renommés, auraient dû simplifier les démarches administratives. Cela les a plutôt complexifiées. Ces avancées n’ont souvent pas été bien notifiées au niveau local. Les critères ou justificatifs demandés restent trop à la discrétion de chaque service consulaire.» Il estime que les instituts français locaux ont un rôle à jouer pour déterminer, auprès des consulats, si les demandes de visas proviennent de vrais artistes ou pas.
Le Passeport talent devait concerner 10 000 personnes par an (pas seulement dans le spectacle), il n’en toucherait que 500 à 1 000… Un dispositif jugé quasi inutile par beaucoup de producteurs. Animé depuis 2009 par le réseau Zone Franche, le Comité Visas Artistes compte une représentante du ministère de l’Intérieur depuis deux ans. Il permet de fluidifier le traitement des demandes de visas refusées pour des raisons litigieuses. Le cas du rappeur Krotal lui a été soumis. «Mais quelle humiliation ! Quelle image pour notre pays à l’extérieur ! Beaucoup d’artistes préfèrent ne pas atterrir en France lorsqu’ils arrivent en Europe», se désole Sébastien Lagrave, qui a déjà essuyé le refus d’un artiste de venir à Africolor, jugeant les formalités dissuasives.
Nicolas Dambre
En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°437
Légende photo : Lemma au festival Africolor
Crédit photo : Joël Bonnard