Jusqu’au 1er octobre, Strasbourg bat au rythme de la 40e édition de Musica. 134 œuvres, dont 17 créations mondiales et 19 françaises, mais aussi 200 Concerts pour soi (tête-à-tête au domicile d’un musicien, à l’aveugle) et plusieurs pièces programmées par les publics grâce à un budget de 2,19 millions d’euros. « Cette légère hausse est artificielle, nuance Stéphane Roth, bénéficiant de fonds dédiés par la DGCA, fléchés sur des projets CNCM à hauteur de 250 000 euros, que nous avons fait le choix de répartir sur trois éditions (2022 à 2024). » Elle masque, en fait, d’importances baisses de contributions de la Sacem (de 90 000 euros en 2019 à 39 000 euros en 2023), de la SACD et « la disparition intégrale de l’Adami ». Le directeur, qui a succédé en 2018 à Jean-Dominique Marco, arrive néanmoins à dégager un disponible artistique en production de 810 485 euros (37 % du budget). La part du mécénat et de l’auto-financement s’élève à 45 000 euros grâce aux apports de Siemens, du Fonds de dotation Demathieu Bard Initiatives et la Caisse des dépôts.
Musica tente de toucher, depuis la musique, une ligne proche de celle du Kunstenfestivaldesarts (Bruxelles). Ces dernières années ont ainsi vu le jour 100 cymbals (2019) de Ryoji Ikeda – artiste ne venant pas de la musique – avec Les Percussions de Strasbourg, et Music for percussion 2 (2020), ou encore Gay Guerilla, du compositeur noir et oublié Julius Eastman (2019). « Si nous n’avons pas vocation à être une boîte de prod’, nous portons en production déléguée des projets qui font sens, comme, cette année, Egal (avec le concours du Césaré, de l’ensemble We Spoke et du mécénat de Dematthieu Bard Initiatives), parcours sensoriel d’écoute globale en forme de concert-expérience. L’idée est de mêler publics sourds, malentendants et entendants autour de pièces musicales à dimension visuelle, corporelle ou vibratoire. »
Délocalisations
Après ses incursions à Mulhouse et Nancy, c’est à Bâle (Suisse) que se clôturera le festival, entre visite du musée Tinguely et pièces de Simon Steen-Andersen (l’une des têtes d’affiche de la 41e édition, avec Ted Hearne, qui crée notamment l’opéra Don Giovanni aux enfers, à Strasbourg) et Georges Aperghis. Au printemps 2024, Musica traversera la France, le temps d’un week-end, pour une carte blanche au Lieu Unique, à Nantes. « Cette délocalisation est l’occasion pour nous d’emmener des formations et des artistes ayant marqué nos dernières éditions afin de présenter un panorama de la création musicale d’aujourd’hui. Et, bien sûr, nous en profiterons pour proposer des rencontres et des expériences d’écoute s’affranchissant des frontières habituelles d’écoute, comme Egal.»
Thomas Flagel
En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°543
Légende photo : Stéphane Roth, directeur général de Musica.
Crédit photo : Christophe Urbain