A Montpellier, le Printemps des comédiens (du 30 mai au 21 juin) accueillera l’Afghan Girls Theater Group pour le spectacle Les Messagères, d’après Antigone de Sophocle, mis en scène par Jean Bellorini, directeur du TNP de Villeurbanne. Ce dernier relate : « Lors de l’arrivée des Talibans à Kaboul en août 2021, elles ont quitté l’Afghanistan seules, laissant tout derrière elles, dans une forme d’élan de survie et d’inconscience, grâce à une lettre d’invitation des autorités françaises. » Alors âgées de 17 à 23 ans, les neuf femmes étaient toutes scolarisées et participaient de façon amateure à cette troupe de théâtre coordonnée par le metteur en scène Naim Karimi, qui les a suivies en France. La Ville de Villeurbanne les loge jusqu’en septembre prochain, avec l’aide de la municipalité de Lyon.
En novembre 2022, elles ont créé un premier spectacle, plus autobiographique que le suivant, au Théâtre Nouvelle Génération, Le Rêve perdu. « Notre priorité a d’abord été qu’elles apprennent le français et règlent leurs démarches administratives pour être autonomes, poursuit Jean Bellorini. Le projet artistique devait venir après la reconstruction humaine. Certaines caressent le rêve de devenir comédiennes, elles suivent des études universitaires en France, ce qui nous empêche de jouer trois semaines d’affilée en tournée. » Une assemblée des femmes, aujourd’hui, d’après Aristophane, sera également présentée lors du festival, en plein air.
Conçue avec le Théâtre national palestinien, cette pièce est née à l’initiative de l’Institut français de Jérusalem, mise en scène par Roxane Borgna et Jean-Claude Fall. Sur le plateau, cinq femmes et trois hommes, arrivés de Palestine où ce spectacle a été donné à Jérusalem, Bethléem, Jéricho et Ramallah. Il est l’occasion de questionner la place des femmes, avec de nombreux témoignages vidéos réalisés sur place par Laurent Rojol. « Nous ne voulions pas créer un spectacle sur le conflit israélo-palestinien pour donner des leçons. Le thème des femmes est arrivé comme une évidence car il est récurrent dans la société palestinienne. À première vue, ce n’est pas un spectacle militant mais plutôt une comédie, mais durant la pièce, nous menons un débat avec le public » explique Jean-Claude Fall. La première fut une foire d’empoigne. Une comédienne veille désormais à canaliser les échanges. La circulation des comédiens dans le pays ou à l’étranger a été compliquée. Roxane Borgna se souvient : « Tout est compliqué et empêché par l’administration israélienne, c’est une stratégie de guerre pour montrer que les Palestiniens ne sont pas libres. » Une des comédiennes, Mays Assi, n’a ainsi pas pu venir pour jouer cette pièce à l’Institut du monde arabe en 2023. Les metteurs en scène aimeraient pouvoir prochainement la présenter à Paris.
Nicolas Dambre
En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°560
Légende photo : Une assemblée des femmes, aujourd’hui
Crédit photo : Laurent Rojol