Les conséquences des annulations de spectacles ont été immédiates et radicales pour les prestataires de la scène. Le groupe B Live (son, éclairage...) a fermé depuis mi-mars les sites de ses 14 sociétés et estime que son chiffre d’affaires (75 à 80 millions d’euros) sera au moins divisé par trois avec les reports du Printemps de Bourges et de nombreuses tournées. Pour le Désoiffeur, spécialiste de la vente ambulante de bière dans les stades et festivals, son directeur général Benjamin Laflaquière, observe : « Les rassemblements de plus de 5 000 personnes sont notre cœur de métier, avec 10 à 200 vendeurs. Je m’attends à une perte de plus de 90 % de mon chiffre d’affaires cette année. »
La société bretonne Art Light devait intervenir dans de nombreux festivals (Art Rock, Vieilles Charrues…) : « Nous n’avions pas reçu de bons de commandes ni d’acomptes », confie Emmanuel Gourong, directeur technique. Mais si des acomptes sont prévus dans les conditions générales de vente et ont été versés, ils ont bien souvent été remboursés, livre Alexia Beyaert, gérante de Carriage R.V. (location de tourbus), « afin de préserver une bonne entente avec des clients souvent fidèles. » Malgré de lourdes charges, comme le remboursement des emprunts pour la cinquantaine de véhicules que loue la société.
Le Syndicat des prestataires de services de l’audiovisuel scénique et événementiel (Synpase), relève par la voix de son délégué général, Philippe Abergel : « Quelle que soit la taille des entreprises, elles contractent une dette importante pour investir dans du matériel, ce qui pèse sur leur chiffre d’affaires. Sur le terrain, nous constatons souvent que le prêt garanti par l’État peut être validé par la BPI, mais pas par la banque. Si d’autres mesures ne sont pas prises pour soutenir les entreprises, nous allons assister à de nombreux licenciements et dépôts de bilan. »
Reprise des chantiers ?
Seule lueur d’espoir avec la fin du confinement, la reprise des chantiers et de l’équipement des salles de spectacles, qui représentent environ 15 % du chiffre d’affaires des prestataires, d’après le Synpase. Durant cette crise, le syndicat a conçu le site Prestataires solidaires, pour fournir savoir-faire et matériels aux services d’urgence.
Quelques uns ont su rebondir. Comme le Désoiffeur, qui a adapté son dispositif à la distribution de gel hydroalcoolique dans les espaces publics. Mais cette activité restera anecdotique. Mikaël Maurin, directeur général adjoint du groupe B Live, avance : « Nous risquons d’assister, lors de la reprise, à l’amplification des phénomènes de concurrences entre prestataires sur la qualité ou sur les prix. » C’est également ce que craint le Synpase, par la voix de sa présidente, Frédérica Legeard-Lemée : « À long terme, nos entreprises devront pouvoir conserver leurs marges pour rembourser avances et prêts. Il ne faudra pas casser les prix pour sortir de cette crise. »
Nicolas Dambre
En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°472
Crédit photo : D. R.