A peine arrivé, sitôt limogé. L’association gestionnaire du Pannonica, Nantes Jazz Action (NAJA), a mis fin à la période d’essai de son directeur artistique Frédéric Roy, nommé à l’automne par le ministère de la Culture. Une situation rarissime pour une structure de cette envergure, seul club de jazz labellisé SMAC en Pays de la Loire, qui met en péril jusqu’à sa pérennité. Sommant l’association de s’expliquer, les tutelles ont suspendu leur soutien financier. Les acteurs culturels nantais se sont émus de la situation. Des artistes ont lancé une pétition de soutien à Frédéric Roy. Les structures partenaires du Pannonica (Lieu Unique, Stereolux ou encore le Grand T) ont fait savoir qu’ils suspendaient leur collaboration.
Au cœur du litige : la gouvernance du Pannonica, dont l’association a fait le choix d’une codirection, juste avant que le décret du 28 mars 2017 impose une unique direction à la tête des futures SMAC. « Frédéric Roy est venu avec une mission précise, sur commande des tutelles : celle de détruire la structuration horizontale et le projet participatif du Pannonica pour en prendre la direction générale », considère Matthieu Jouan, membre du conseil d’administration. Tout en évoquant « l’attitude offensive et agressive du codirecteur vis-à-vis de ses équipes », la présidente Elisabeth Sourdillat renvoie la responsabilité aux tutelles : « En faisant le choix d’imposer sans le dire un directeur chargé de faire table rase, le jury a provoqué une situation inextricable et explosive. » Sur le terrain, les relations entre Frédéric Roy et son directeur administratif, Denis Deloffre, étaient devenus exécrables, au point que l’association avait mis en place des temps de télétravail pour que les deux hommes ne se croisent plus au bureau.
L’état, qui considère n’avoir pas reçu de proposition de sortie de crise, a mis en demeure l’association NAJA de se conformer dans un délai maximum de six mois aux obligations du label SMAC. « La co-direction, jamais remise en cause avant, ni même lors du recrutement, est désormais attaquée par le prisme du décret de 2017 qui devient l’argument pour revenir à la direction verticale », fulmine Matthieu Jouan. Si elle apparaît au grand jour, cette crise ponctue une situation déjà tendue entre l’ancien directeur artistique, Cyrille Gohaud, parti en juin 2019 et le directeur administratif, Denis Deloffre. Le processus même du recrutement avait été compliqué, le CA de NAJA ayant écarté la candidature de Frédéric Roy, « jugée trop peu ambitieuse et sans promesse de renouveau pour la structure », avant qu’il soit replacé en lice, par l’ancien président, Guillaume Lecomte et les tutelles. Frédéric Roy n’a pas souhaité s’exprimer.
David Prochasson
En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°464
Légende photo : La salle du Pannonica
Crédit photo : D. R.