Depuis plusieurs mois, la succession à Jean-Dominique Marco, après 28 ans à la tête de Musica, agitait le milieu. Dans un contexte budgétaire contraint, on pouvait craindre un revirement des équilibres institués depuis la création, en 1982, du plus important festival de musique contemporaine d’Europe. Musica fait partie de la poignée de festivals financés en administration centrale. «Le ministère de la Culture s’est toujours tenu au deal de départ : s’aligner sur le montant des subventions réunies par les collectivités territoriales», assure l’ancien directeur général qui se déclare ravi de la nomination de Stéphane Roth. «Tous les directeurs de Musica avaient la trentaine à leur prise de fonction, ce qui assure un sain renouvellement générationnel».
Même enthousiasme du côté de la municipalité où Alain Fontanel (LREM), premier adjoint au maire en charge de la culture, loue «un choix dont la dimension audacieuse colle au festival, la meilleure des réponses possibles face aux incertitudes». Il précise qu’il a été «en contact étroit avec la ministre de la Culture pour s’assurer de son engagement futur». Le nouveau directeur général sait que la conjoncture n’est plus celle des années 1980 et qu’il ne «mange pas aux mêmes fruits» que son prédécesseur. Il hérite d’un budget sans évolution depuis 15 ans, plafonnant à un peu plus de deux millions d’euros, alors que l’inflation et les coûts artistiques ont grimpé. En 2012 et 2013, les crédits Europe créative obtenus avec le Réseau Varèse avaient dopés le budget de 300 000 euros.
Depuis, Jean-Dominique Marco reconnaît avoir «subi la baisse des partenariats de sociétés civiles et privées (Sacem, SACD) et de fondations comme Orange ou Lagardère qui n’aiment pas le risque lié au soutien à la création. Ils préfèrent donner un million à l’Opéra de Paris et afficher ce prestige plutôt que 100 000 euros à un festival en province.» A contrario de la tendance, l’expérience de Stéphane Roth en tant que directeur éditorial à la Philharmonie de Paris a renforcé sa conviction de «ne pas se concentrer sur le mécénat, une voie bouchée et un modèle épuisé pour la musique contemporaine». Son projet vise plutôt à miser sur la valorisation des publics «en créant une académie des spectateurs» et de la médiation, en faisant «feu de tout bois, avec la même confiance en nos idées que lorsque nous attendions la livraison de La Philharmonie».
Thomas Flagel
En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°434
Légende photo : Stéphane Roth
Crédit photo : Alex de La Forest