La conférence de bilan du 43e Festival de Montpellier, le 3 juillet, a permis au directeur de l’institution, Jean-Paul Montanari, l’habituelle opération de satisfaction consubstantielle à ce genre d’exercice. Les chiffres sont bons, 32 000 spectateurs pour 57 représentations et un taux de fréquentation de 96 %. L’année 2023 se rapproche des résultats de 2019 (35 000 spectateurs) et les effets du séisme Covid commencent à s’estomper d’autant que le public du festival témoigne d’une fidélité rassurante : 70 % des places disponibles étaient vendues au bout des 15 premiers jours de réservation, et pas seulement pour les têtes d’affiche Preljocaj ou Pina Bausch… Cette confiance remarquable pour un festival très axé sur la création permet d’assurer 32 % d’autofinancement.
Seul bémol, les professionnels tardent à revenir : ils n’étaient que 308 journalistes et programmateurs venus de 21 pays à fréquenter la manifestation contre plus de 500 auparavant. Mais tout est dans le bon sens, fors une certaine inquiétude ressentie au cours de la conférence et qui est d’abord financière : « Il manque 300 000 euros pour cette édition. Nous avons pu assurer en piochant dans nos réserves, mais pour 2024…, souligne le directeur. La tendance devrait amener à un déficit de 400 000 euros l’année prochaine et il n’y aura plus de réserve. » Alors Jean-Paul Montanari évoque à nouveau cette antienne qui amuse le milieu professionnel depuis au moins dix ans : son âge. Et, partant, sa succession : il aura 77 ans l’année prochaine et semble tout à fait en verve et forme pour aller plus loin d’autant que le paysage politique lui est favorable…
Mais cette édition est la première sans Gisèle Depuccio, directrice adjointe, présente depuis 40 ans et cette absence pèse sur le « patron ». L’année 2024 sera aussi celle du départ de Christian Rizzo, directeur du centre chorégraphique national de Montpellier avec lequel, et bien que les deux maisons partagent les mêmes superbes bâtiments de l’Agora, les relations sont notoirement mauvaises. Le CCN s’est d’ailleurs – comme l’Opéra Comédie – retiré de la saison de danse, laissant le festival et ses 3,3 millions de budget tout compris assumer. Alors, et quoiqu’il ne veuille pas confirmer officiellement le projet, Jean-Paul Montanari se verrait sans doute volontiers partir fin 2024, offrant ainsi la possibilité de nommer le même directeur pour le festival et le CCN. Une fusion sur la table de travail du ministère, qui est bien entre les mains des tutelles, et qui permettrait de solutionner une part de l’équation financière autant que d’apaiser des tensions locales. Ainsi le futur de Jean-Paul Montanari préfigurerait-il un rapprochement qui ferait du CCN de Montpellier l’une des plus importantes institutions chorégraphiques d’Europe… Cela s’appelle une ambition.
Philippe Verrièle
En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°542
Crédit photo : D. R.