Les acteurs culturels et les opposants au gouvernement hongrois ce sont émus après l’annonce, le 9 décembre, d’une nouvelle loi sur la culture. Si une importante vague de protestations a poussé le parti au pouvoir à revoir son projet à la baisse, cette loi a néanmoins été adoptée le 12 décembre en urgence, sans négociation préalable. La mesure principale crée des conditions au soutien financier de l’état pour le fonctionnement des théâtres municipaux. Les collectivités locales devront choisir entre financer en totalité leur théâtre ou accepter un droit de regard de l’état sur la nomination de leurs dirigeants. Le parti de Viktor Orbán justifie la réforme par le scandale de harcèlement sexuel qui a agité le Théâtre József-Katona, sous la tutelle de la mairie de Budapest, mais dont les ressources proviennent en majorité de l’état.
Le gouvernement met en avant la transparence nécessaire quant à la gestion. Les municipalités, qui manquent de fonds à allouer à la culture, vont avoir du mal à assurer l’activité de leurs théâtres si elles refusent de coopérer avec l’état. Cette loi surgit après le revers électoral essuyé par le parti d’Orbán lors des municipales d’octobre 2019, qui ont vu plusieurs grandes villes, dont Budapest, passer à l’opposition. Celle-ci voit dans les mesures du 12 décembre une tentative de réduire leur pouvoir. Interrogé par La Lettre du Spectacle, le metteur en scène Árpád Schilling déclare : « Cette loi n’a d’autre but que de permettre au gouvernement d’exercer un contrôle total sur les théâtres. Cette méthode n’est pas nouvelle, le processus législatif se déroule de cette manière depuis 2010, en ignorant complètement des organisations et des aspects professionnels, faisant référence à une sorte de méli-mélo des intérêts nationaux. Entre temps, des professionnels respectés sont humiliés par fausses accusations dans les médias dominés par le gouvernement. » En France, le Syndeac se dit « très inquiet » de cette loi qui « porte atteinte gravement à la liberté culturelle, et constitue une tentative d’étouffer l’indépendance artistique des théâtres. »
Agnès Lucas
En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°463
Légende photo : Árpád Schilling
Crédit photo : Nagy Zagon