En l’absence de festivals, les programmateurs d’artistes de l’espace public voient leurs habitudes bouleversées. Interrogés par La Lettre du Spectacle, ils expriment le souci de soutenir au mieux les compagnies et privilégient les reports pour permettre « que les spectacles soient vus », comme le formule Morgane Le Gallic, responsable du spectacle vivant à Pantin (93). à condition que les artistes soient disponibles et que les budgets suivent. Certains « temps forts » apparaissent à l’automne, sur le modèle de VivaCité, à Sotteville-lès-Rouen (76). Quelques événements ont été maintenus cet été et « remaniés », comme à Laval (53) ou à Notre-Dame-de-Monts (85) où le festival gardera les spectacles dans des parcs clos permettant une jauge. « Il y a une moins grande appréhension de la part des spectateurs à voir un spectacle en extérieur plutôt qu’en salle », observe Christian Lalos, directeur du Théâtre de Châtillon (92). La situation complique le repérage, poursuit-il : « les festivals des arts de la rue annulés constituent en effet des temps privilégiés pour découvrir des équipes et des projets ».
Ceux qui ont des programmations pluridisciplinaires et qui ne font que de la diffusion sont particulièrement affectés, confirme Bertrand Turquety, directeur de Fontenay en scènes (94). Souvent, la prochaine saison est déjà prête, « entre ce qui était déjà programmé et les dates de report », note Pauline Piganiol, responsable du service culture de la communauté de communes Cère & Rance En Châtaigneraie (15). Le problème se pose pour la saison suivante. Certains évoquent la possibilité de programmer des spectacles « en réserve », déjà repérés. Pour les créations, diverses pistes sont évoquées. Les temps forts proposés à l’automne serait l’occasion de découvrir des spectacles. Les programmateurs disent qu’ils seront attentifs aux sorties de résidence, comme David Michaud, DAC à Notre-Dame-de-Monts.
Les lieux « essaieront de recevoir un maximum de présentations professionnelles », en plus de « déplacements dans d’autres régions » plus nombreux, affirme Morgane Le Gallic. Les réseaux joueront un rôle important, en mutualisant l’attention : le Groupe des 20 Théâtres en Île-de-France en est un exemple. L’expertise des collaborateurs et les contacts interpersonnels sont également cités, notamment par Paulo Lemoigne, responsable service action culturelle à Laval (53). Certaines équipes artistiques prennent les devants et contactent les diffuseurs avec des « propositions réadaptées ». Peut-être la programmation sur dossier va-t-elle gagner un peu de terrain : programmer du spectacle vivant sans l’avoir vu vivre, en faisant confiance.
Mathieu Dochtermann
En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°475
Légende photo : Au festival des Rias, à Quimperlé, en 2016
Crédit photo : Franck Betermin