Pascal Keiser, commissaire général de la candidature Bourges 2028, livre ses impressions après la sélection de la ville, le 13 décembre, par le jury européen.
Votre candidature à « taille humaine » a gagné parce qu’elle avait le plus petit budget ?
Cela dépend par rapport à quoi. Les dernières capitales européennes de la culture ont des budgets équivalents, de l’ordre d’une cinquantaine de millions d’euros. Ce que veut la Commission européenne, c’est l’impact, pas un budget en valeur absolue. Avec Bourges, nous sommes sur un investissement par habitant deux à trois fois supérieur à celui des concurrents. Pour Bourges, un budget de 46 millions et des apports en nature, soit environ 50 millions pour une ville de 65000 habitants et le département du Cher, c’était solide.
Quels ont été les éléments déterminants ?
On verra le rapport du jury en janvier, mais le programme artistique a impressionné. Nous n’avions donné aucun nom d’artiste au premier tour, ce qui amenait des possibilités. De grands artistes se sont engagés comme la photographe Zanele Muholi, des pointures de l’architecture comme Petra Blaisse, Rem Koolhaas, des penseurs comme Vinciane Despret ou Gilles Clément sur le rapport à la nature, Camille de Toledo autour du Parlement de la Loire, des artistes comme Sarkis, Tarek Atoui, Tiago Rodrigues… Et ils se sont engagés sur un travail de six mois avec des projets concrets et détaillés. On a aussi de grands commissaires d’exposition comme Hanru Hou, David Moinard… qui ont la capacité de déployer des expositions internationales avec un regard attaché au territoire. Et aussi Anne-Laure Chamboissier, du programme de décentralisation du Centre Pompidou, Boris Vedel qui va travailler sur la fête d’ouverture avec Bintou Dembele…
Le partenariat avec le Printemps de Bourges sera-t-il essentiel ?
Oui, ainsi qu’avec Claire Gibault qui a installé le Paris Mozart Orchestra à Bourges pour le volet classique. Les musiques actuelles sont au cœur du projet. Bourges sera la première capitale européenne des musiques actuelles. C’est aussi une européanisation des filières artistes émergents du Printemps de Bourges, avec ses partenaires de Brighton et Groningen. 25 % des appels à projets seront fléchés vers la musique, y compris le rap.
D’autres volets importants ?
L’aspect climat a été décisif. On a présenté la première Capitale européenne avec un projet bas-carbone et un budget climat, établi avec Hermann Lugan. Cela nous a amenés à intégrer les mobilités bas-carbone dans le programme artistique, ce qui ne s’était jamais fait. Les voyageurs qui viendront de toute l’Europe par train de nuit seront accompagnés avec des projets de grands artistes comme Mohamed El Khatib, Marta Górnicka, Yngvild Aspeli. Il y a aussi la prise en compte du rééquilibrage territorial, de la crise de la jeunesse, de la représentativité : des citoyens sont tirés au sort pour participer… Cela a compté.
Quelle est la prochaine étape ?
2024 sera l’année de mise en place et de structuration du projet, puisqu’on était une petite équipe par rapport à nos concurrents. Les appels à projets seront lancés à partir de 2025.
Propos recueillis par Yves Perennou
En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°551
Crédit photo : Alexandra de Laminne