La recherche PIC-PIV lancée voici un an par la Chambre syndicale de la facture instrumentale (CISV) avec de multiples partenaires a livré une moisson de résultats, fin mars. L’objectif était de répondre à des questions essentielles pour les professionnels de la musique : est-il dangereux de pratiquer des instruments de musique ? Que doit-on savoir pour manipuler ces instruments ? Fanny Reyre-Ménard, vice-présidente, peut aujourd’hui répondre avec assurance : « Non, ce n’est pas dangereux. Les particules projetées sont moins nombreuses, plus petites, moins chargées en virus. Et elle sortent à petite vitesse. » Toute l’intérêt de cette affirmation repose sur le sérieux du travail mené depuis un an, confronté aux résultats d’une quinzaine d’autres programmes dans le monde. « Au début de la pandémie, on a entendu tout et n’importe quoi à propos de la pratique instrumentale, jusqu’à des gens en Allemagne qui prétendaient qu’il fallait se tenir à 12 mètres d’un trompettiste. Il était nécessaire de mener un travail de fond. »
Bien nettoyer l’instrument
Le programme a commencé par construire des fiches pratiques sur la désinfection des instruments : quels produits, quelles techniques en fonction des matériaux ? Des ingénieurs de la facture instrumentale, des scientifiques, des spécialistes de la circulation des liquides et des gaz ont aidé à déterminer des modèles qui ont finalement été confrontés au virus réel, dans le laboratoire UVE (Unité des virus émergents) de la Faculté d’Aix-Marseille : « On a ainsi fait valider des protocoles que chacun peut s’approprier, poursuit Fanny Reyre Ménard. Nous avons mis certains produits de côté et nous avertissons contre l’usage des UV. » Des études ont porté sur la propagation des aérosols pendant que joue un ensemble instrumental. Une expérience menée dans une salle de répétition de la Philharmonie de Paris a permis de mesurer l’importance de la ventilation. Si le protocole recommande une distance de deux mètres entre chaque musicien, c’est en raison de la règle sanitaire en France qui impose cette distance sur le lieu de travail en cas de non-port du masque.
Chanter masqué
Le chant a fait l’objet d’études particulières. Là, les résultats confirment malheureusement l’intuition. « L’idée qu’avec 2 mètres de distanciation, on pouvait chanter sans masque n’a pas résisté. Donc les chanteurs doivent porter des masques, sauf à être testés, évidemment. La bonne nouvelle, c’est l’efficacité totale des masques, même en situation de chant ».
Une des conséquences de l’étude est de montrer que les conservatoires pourraient être ouverts aux adultes, un enjeu important pour la pratique en amateur. Du côté professionnel, la recherche signifie aussi la possibilité d’accueillir du public en salle ou en plein air, assis et masqué, dans une salle où joue un orchestre, avec des chanteurs masqués. Ces constats seront-ils suivis d’effet dans la réglementation ? Le ministère de la Culture accompagne et même finance cette recherche. Il a fait référence aux guides PIC-PIV pour la désinfection des instruments. Reste à franchir tous les étapes du parcours administratif. Autre enseignement essentiel pour Fanny Reyre-Ménard, le monde musical et la filière de la facture instrumentale ont montré leur capacité à travailler main dans la main sur un projet au service de toute la communauté musicale.
Yves Perennou
En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°491
Légende photo : Avec les musiciens de l’Orchestre de chambre de Paris
Crédit photo : D. R.