
La directrice du Syndicat des musiques actuelles (SMA) livre sa vision d’un secteur durement touché de plein fouet par l’inflation des coûts et la baisse des moyens.
La Scène : Comment définiriez-vous aujourd’hui les grands enjeux qui traversent le paysage des musiques actuelles ?
Je pense qu’ils font le lien avec les musiques actuelles, mais que ce sont avant tout des sujets sociétaux. Évidemment, la transition écologique est le premier d’entre eux, le bilan carbone des structures, mais aussi les questions de biodiversité ou de réemploi. La question de l’égalité entre les femmes et les hommes, mais aussi entre les personnes, est très prégnante, tout comme le sont les sujets liés à la montée de l’extrême droite et aux atteintes à la liberté d’expression. Je pense aussi à la question de la qualité de vie et des conditions de travail, avec les difficultés à recruter, l’évolution des modes de management dans le secteur, et le sujet des addictions dans nos métiers, qui commence aussi à se faire jour. Ce sont des sujets sociétaux et il est vrai que, souvent, les musiques actuelles ont été à l’avant-garde pour les traiter. Je pense aux festivals qui l’ont fait sur la transition écologique. Il y a une forte volonté de s’emparer de ces sujets, mais nous ne devons pas oublier la question de la survie des structures. Nous sommes « à l’os » et, comme je le dis à tous mes interlocuteurs, on ne joue pas au poker. Cela va vraiment très, très mal. Des salles ont fermé l’an passé. D’autres le feront en 2025, probablement des festivals aussi. Et par ricochet, des producteurs de spectacles. Il est vraiment temps de bouger.
La Scène : De quelle manière les récentes coupes budgétaires annoncées par les collectivités locales et l’État affectent-elles cet écosystème ?
Ces coupes viennent de différents endroits, elles sont dogmatiques, comme en région Pays de la Loire ou dans l’Hérault, ou bien subies parce que les collectivités n’ont plus les moyens. Un tiers des Départements seraient en situation vraiment très délicate. Nous pensions que l’État était, dans ce paysage, un point d’ancrage un peu stable. Et l’on s’aperçoit, malheureusement, que ça n’est pas le cas. En effet, le budget du ministère de la Culture pour 2025 a lui aussi subi des coupes, alors que nous nous attendions à un budget stable en ce tout début d’année 2025. Nous nous sommes alors collectivement mobilisés et avons obtenu la suppression du fonds d’urgence, un temps annoncé par la ministre en contrepartie des baisses du programme 131 « création ». Aussi, nous saluons la sanctuarisation de ces crédits par la ministre : ils sont indispensables pour le fonctionnement de l’ensemble des structures sur les territoires. Toutefois, à l’heure qu’il est, le financement du Fonpeps pour l’année en cours n’est toujours pas assuré à 100 %, il manque en effet une partie des crédits ; aussi, nous sommes prêts à nous mobiliser aux côtés de la ministre pour obtenir le dégel et financer ainsi ces aides à l’emploi qui demeurent cruciales pour le secteur. Le programme « transmission des savoirs et démocratisation » (361) a lui aussi vu ses crédits diminuer, dont ceux de la part individuelle du pass Culture. Nous serons attentifs ces prochains mois à la réforme de ce dispositif récemment annoncée. En effet, depuis sa création, ce projet présidentiel a coûté plus d’un milliard d’euros et les différents rapports montrent bien que sa portée reste limitée tant en matière de démocratisation que de fidélisation des publics. Nous sommes évidemment convaincus que si ces sommes avaient été allouées directement aux structures culturelles, ces dernières auraient pu en faire bon usage afin de poursuivre leur travail à l’intention des publics. [...]
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Propos recueillis par Cyrille Planson
Légende photo : Aurélie Hannedouche
Crédit photo : Julien Pebrel