Interview de Jean-Philippe Thiellay, président du CNM
Les aides du CNM conditionnées au protocole contre les violences sexistes : comment cela va-t-il se passer ?
Ce protocole, comme l’ensemble de notre action, doit permettre un changement culturel. Nous imposons à tout demandeur qui dépose un dossier de s’engager à mettre en place les rubriques du protocole : informations des salariés, formation de l’équipe, mise en place d’un référent... C’est un engagement. On ne vérifiera pas entreprise par entreprise avant l’étude de la demande, mais on accompagne le dispositif d’outils : bases de donnée et outils de formation. Si une entreprise ne respecte pas les obligations de formation, les aides seront suspendues. C’est valable pour toutes les aides.
Les commissions du CNM seront-elles toute paritaires ?
Oui, le chantier démarre. En vue du conseil d’administration de mars et de celui de juin, nous reconfigurons la composition des commissions. En ce moment, il y a des réunions pour refondre le dispositif d’aides. C’est compliqué, car on part d’une filière masculine, mais on y arrivera cette année.
Ira-t-on vers des aides bonifiées pour les productions à effectifs paritaires, comme au CNC ?
Absolument. Je suis gêné par le terme d’éga-conditionnalité car l’objectif n’est pas d’imposer des plateaux à 50/50. Il doit y avoir une liberté de programmation. En revanche, j’adhère à l’idée de bonus. Ceux qui encouragent la présence de femmes chez les artistes, techniciens, personnels administratifs doivent pouvoir être aidés davantage. Ce sera fait en 2021. Nous sortons l’étude sur la place des femmes dans les festivals. Je pense qu’on va réaliser des progrès.
Le CNM a-t-il un rôle à jouer pour lutter contre les stéréotypes sexistes dans la musique (à travers les paroles de chansons ou les images des clips) ?
Oui, le CNM, comme lieu de concertation, est là pour mutualiser l’intelligence et analyser les problèmes. Après, le CNM ne va pas s’ériger en juge de ce qui est bien ou pas. Il est évident que dans l’hypothèse de créations offensantes ou véhiculant des stéréotypes, le CNM doit avoir un rôle d’orientation. Le changement culturel, c’est la place des femmes, la lutte contre le stéréotype. C’est une conviction que j’avais avant d’arriver au CNM. La loi donne cette mission à l’établissement. Le budget dans ce sens passe de 300 000 à 1 M€ en 2021. Cela permet d’aider des projets comme Présence Compositrices avec le projet Clara ou Ici c’est cool, ou les Catherinettes.
Propos recueillis par Yves Perennou
En partenariat avec La Lettre du spectacle n°486
Légende photo : Jean-Philippe Thiellay
Crédit photo : Eléna Bauer